Terres rares, métaux, minerais en tout genre… autant de matériaux stratégiques (non renouvelables) dont la demande a depuis quelques décennies explosé face au développement accéléré de notre environnement technologique, mais aussi de l’initiation de la transition énergétique. Une demande satisfaite par une hausse de l’exploitation minière. Eh oui, ce n’est pas magique.
60 % des sites miniers dans les tropiques sont apparus après l’an 2000
Si pour nous, Européens, cet accroissement de la demande n’a que peu d’impact sur notre environnement direct, ce n’est pas le cas des pays tropicaux, qui renferment la majorité des ressources. Une nouvelle étude, publiée dans la revue Nature, révèle qu’environ 400 sites miniers sont répartis dans 49 pays des régions tropicales (Amérique du Sud, Afrique, Asie et Océanie), avec 80 % situés dans la zone des 20° de latitudes. Une hausse importante des activités minières a de plus été observée depuis le début du XXIe siècle. Quelque 60 % des sites actuels sont ainsi apparus après l’an 2000 et 46 % après 2006. Dans la plupart des cas, il s’agit de mines d’or. La recherche de diamants arrive en seconde position, principalement en Afrique centrale et dans le centre-ouest du continent. En Indonésie, aux Philippines et en Malaisie, le nickel est également exploité.
DEPUIS LE XXIE SIÈCLE, ON NOTE UNE CLAIRE AUGMENTATION DES COURS D’EAU IMPACTÉS PAR L’INDUSTRIE MINIÈRE DANS LES TROPIQUES. © EVAN DETHIER
L’eau des rivières chargée de particules sédimentaires en suspension
Or, cette activité minière n’est pas sans conséquence sur l’environnement et notamment sur la qualité des systèmes fluviatiles. C’est bien connu, l’exploitation aurifère a souvent lieu dans les rivières. L’extraction de l’or demande souvent l’emploi de cyanure et de soude, voire encore de mercure. Des éléments qui contaminent les sols, les rivières et les nappes phréatiques. Mais dans cette nouvelle étude, c’est un autre problème qui est pointé du doigt. Car l’excavation intensive des sols produit d’énormes quantités de sédiments qui sont relargués dans les rivières. L’eau se retrouve alors chargée en particules d’argile et de sable. Cette turbidité anormalement forte est largement visible sur les images satellitaires. Les chercheurs ont ainsi déterminé que 35 000 kilomètres de rivières tropicales seraient ainsi affectés par ces opérations minières, ce qui représente 6 % de la longueur totale des quelque 500 000 kilomètres de rivières tropicales à travers le monde. Or, la présence d’importantes quantités de particules en suspension dans l’eau impacte sévèrement la vie aquatique, particulièrement riche dans ces régions du globe. Dans une eau fortement turbide, les poissons sont en effet incapables de voir leurs proies ou prédateurs. Sans compter l’endommagement des branchies, qui augmente le risque de maladies et la mortalité.
SITE EXPLOITÉ AU PÉROU. L’EAU, CHARGÉE EN SÉDIMENTS EN SUSPENSION, SE DÉVERSE DANS LA RIVIÈRE ET DÉTÉRIORE SA QUALITÉ. © JASON HOUSTON (ILCP REDSECKER RESPONSE FUND/CEES/CINCIA)
Un problème qui risque d’empirer face à l’augmentation de la demande
Avec l’objectif de la transition énergétique et notamment du tout électrique, il est à peu près sûr que les activités minières ne devraient pas décroître dans un futur proche, bien au contraire. Pour protéger la biodiversité des pays tropicaux et éviter de passer d’un désastre à un autre, il devient donc urgent de réglementer ces pratiques. Les auteurs de l’étude espèrent ainsi que leurs résultats aideront à sensibiliser les gouvernements et décideurs politiques.