Réinventer l’avenir de l’action climatique en Afrique : La numérisation de la filière café comme cas d’essai

La COP29, la Climate Week NYC 2024 et l’ensemble des évènements climatiques font la une des journaux. Toutes ces discussions sont centrées sur l’urgence des actions à mener pour être à la hauteur d’un moment charnière pour l’humanité et la planète.

 

Dans toutes les sphères concernées, de l’industrie à la politique publique en passant par la technologie, les parties prenantes sont unies autour de notre engagement à faire progresser l’action climatique.

 

L’enjeu, aujourd’hui, est de répondre à la question du COMMENT. Alors que les engagements ambitieux en matière de neutralité carbone et de durabilité abondent, il est essentiel de veiller à ce que tous les acteurs des chaînes de valeur, en particulier en Afrique, disposent des outils et des financements nécessaires pour atteindre ces objectifs.

 

Lorsque nous discutons avec des exportateurs et des entrepreneurs, des petits exploitants et des économistes africains, il est clair que le secteur du café offre un champ d’expérimentation idéal pour développer une solution numérique durable qui fait progresser à la fois les objectifs climatiques et économiques de la région.

 

Pour l’Afrique, et en particulier pour les pays exportateurs de café, la durabilité est un impératif commercial urgent dicté par la réglementation des grands marchés d’exportation comme l’Union européenne (UE).

 

Selon l’analyse de la Banque mondiale, 13 à 17 % des exportations (a) en Éthiopie et en Ouganda sont soumises à une seule et même réglementation, le règlement de l’UE contre la déforestation (RDUE).

Derrière ces chiffres se cachent des millions de petits exploitants, de commerçants, de transformateurs, d’emballeurs, de prestataires de services logistiques et de foyers dont l’emploi et les revenus dépendent des exportations de café.

 

Nous devons intensifier notre soutien alors qu’ils s’efforcent de naviguer dans un monde assailli par des chocs climatiques et économiques.

 

Le RDUE exige essentiellement des exportateurs de café approvisionnant le marché européen qu’ils certifient que le café exporté n’est pas cultivé sur des terres déboisées, avec 2020 comme référence (c’est-à-dire que tout café cultivé sur des terres déboisées après 2020 n’est pas conforme au RDUE).

 

La conformité à ce règlement nécessite une action coordonnée et cohérente dans les domaines de la politique publique, de la technologie et de la finance, les systèmes de traçabilité numérique constituant la clé du suivi du café «de la plantation à la tasse».

 

En outre, les cartes forestières officielles devraient être superposées aux données sur les exploitations pour vérifier qu’il n’y a pas eu de déboisement.

 

Compte tenu de la complexité des exigences de conformité, la question est de savoir ce qui peut être fait pour atténuer un éventuel effondrement des exportations de café et des emplois connexes en Afrique.

 

Premièrement, à l’aide de systèmes d’information géographique, il faut créer des jeux de données granulaires sur les niveaux de référence du couvert forestier en 2020 et recueillir des données à l’échelon des exploitations agricoles sur la couverture actuelle pour confirmer l’état du déboisement (ou son absence).

 

Le coût de cette démarche risque de décourager les petits exploitants, car les grandes plantations auront probablement les moyens de se le permettre. Une solution numérique rentable, financée conjointement par des ressources publiques et privées, serait nécessaire pour développer cet aspect central de la conformité.

 

Deuxièmement, il faut cibler les investissements sur la numérisation de la filière du café en particulier, en améliorant et en développant les systèmes de traçabilité pour suivre le café depuis les terres déboisées jusqu’à son entrée dans l’UE.

 

Outre l’identification des solutions numériques appropriées, il est essentiel de financer l’acquisition de solutions et la formation des acteurs de la chaîne de valeur à leur utilisation.  

 

Troisièmement, il faut améliorer l’adoption et la mise en œuvre de réglementations nationales sur la déforestation afin d’éviter une catégorisation « à haut risque » qui pourrait conduire à une suspension immédiate des exportations de café vers le marché de l’UE.  

 

Quatrièmement, il faut commencer dès maintenant ! Bien que l’application du règlement ait été reportée au 30 décembre 2025, il n’y a pas de temps à perdre, car les solutions devront être testées et étendues à l’ensemble des chaînes de valeur.

 

Les principaux acteurs du secteur élaborent déjà des solutions pour répondre à des aspects spécifiques de ce défi. Rainforest Alliance, par exemple, élargit son processus de certification pour inclure les données nécessaires à la conformité avec le RDUE (mais celle-ci ne pourra être confirmée qu’en janvier 2026).

 

Parallèlement, la FAO a développé des solutions de cartographie numérique comme Whisp pour fournir des informations sur le niveau de déforestation dans les régions productrices de café.

 

La Banque mondiale réalise actuellement des études de marché en Éthiopie et en Ouganda afin de comprendre l’ampleur des investissements nécessaires pour numériser les chaînes de valeur du café, notamment pour se conformer aux réglementations en matière de durabilité.

 

Cependant, une approche cohérente reste nécessaire pour les exportateurs de café en Afrique.

 

Cela nécessitera un pouvoir fédérateur solide et une plateforme où les parties prenantes et les fournisseurs de solutions peuvent rassembler et agréger leurs efforts - pour le secteur du café et plus généralement pour tous les produits de base exportés par l’Afrique et concernés par le nouveau règlement européen. Et il est impératif de le faire dès maintenant, car le temps presse.

 

 

Source : Banque mondiale

 

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